Test - Le chargeur Linogy : innovation battante ou poudre aux piles ?

Les piles, ces cylindres d'énergie qui alimentent discrètement nos périphériques du quotidien...

Face aux appareils de plus en plus gourmands et notre conscience écologique grandissante, l'arrivée d'un système repensé comme celui de Linogy méritait notre attention. Ce chargeur intelligent associé à des batteries lithium-ion AA/AAA promettant 1,5V constants (tension supérieure aux habituelles NiMH) représente une approche intégrée : charger, tester, stocker, tout en suivant son impact environnemental.

Alors que la plupart des accessoires électroniques modernes intègrent désormais des batteries internes, certains de nos gadgets préférés – manettes Xbox, micros sans fil, télécommandes, lampes – continuent d'exiger ces cylindres énergétiques que nous consommons par dizaines.

Les promesses de 1200 cycles de recharge et d'autonomie supérieure aux alcalines classiques font du système Linogy un investissement potentiellement judicieux pour le technophile soucieux de son empreinte écologique comme de son portefeuille.

Ce qu'on a aimé

Un écosystème trois-en-un véritablement pratique

Au-delà d'un simple chargeur, Linogy propose une véritable station de gestion complète pour vos piles. Le module supérieur, accessible via un couvercle transparent, accueille jusqu'à huit batteries simultanément dans des emplacements individuels.

Chaque slot dispose de son propre indicateur LED qui communique intelligemment l'état de la pile : jaune pendant la détection, vert clignotant pour signaler la charge en cours, rouge en cas de pile non rechargeable ou défectueuse, et vert fixe lorsque la charge est complète.

La particularité qui distingue immédiatement ce chargeur des modèles classiques est son système d'auto-éjection : une fois la charge terminée, la pile tombe automatiquement dans le compartiment de stockage inférieur qui peut contenir jusqu'à 40 batteries. Cette fonctionnalité, loin d'être un gadget, facilite considérablement la rotation des batteries et permet d'identifier immédiatement celles qui sont prêtes à l'emploi. Le tiroir bénéficie même d'une surface antidérapante qui prévient le ballottement des piles lors des manipulations.

La base propose également un emplacement dédié à la vérification de l'état de charge des batteries, permettant de trier efficacement les piles partiellement déchargées sans devoir les insérer dans vos appareils.

Des performances solides pour les piles en lithium-ion

Les piles Linogy ne sont pas de simples accumulateurs rechargeables. Conçues avec une chimie lithium-ion ternaire (type NMC/NCA), elles offrent une tension nominale de 1,5V – similaire aux piles alcalines mais supérieure aux NiMH standard (1,2V) – éliminant ainsi les problèmes de compatibilité avec certains appareils sensibles aux variations de tension. Les tests confirment une capacité énergétique d'environ 3,0Wh sous charge modérée (0,5A), et environ 2,5Wh sous charge intensive (2A), ce qui reste inférieur aux 3,6Wh annoncés mais nettement supérieur aux performances des piles alcalines standards en usage intensif.

La courbe de décharge se montre remarquablement stable, maintenant une tension constante jusqu'à épuisement quasi-total, contrairement aux piles alcalines dont la performance se dégrade progressivement. Le temps de recharge d'environ trois heures (versus six heures pour des NiMH comparables) constitue un avantage significatif pour les utilisateurs intensifs.

Les piles intègrent leur propre système de protection contre les surcharges, avec une coupure automatique lorsque la tension descend sous 1,0V – une sécurité appréciable qui prolonge la durée de vie globale. La durabilité annoncée de 1200 cycles représente potentiellement plusieurs années d'utilisation intensive avant remplacement, soit une économie substantielle par rapport aux piles jetables.

Une conscience environnementale affichée

L'écran e-ink intégré au chargeur Linogy n'est pas qu'un gadget : il est censé incarner la philosophie écologique de la marque. Cette technologie, très économe en énergie, affiche en permanence deux informations clés : le nombre de batteries rechargées et l'équivalent en CO₂ économisé. Une animation d'arbre qui pousse accompagne ces données, renforçant visuellement l'impact positif de votre choix.

Un QR code permet d'accéder à un tableau de bord personnalisé où vous pourrez suivre votre contribution environnementale, nommer votre arbre virtuel et même participer à un classement communautaire des utilisateurs les plus éco-responsables.

Bien que ces fonctionnalités puissent sembler accessoires, elles contribuent à sensibiliser l'utilisateur à l'impact concret de ses choix de consommation. Le chargeur lui-même, comme son emballage, témoigne de cette approche : matériaux recyclables, emballage sans plastique, encres à l'eau...

Linogy affirme avoir réalisé plus de dix itérations de développement pour aboutir à ce produit, privilégiant systématiquement les options les plus respectueuses de l'environnement. La compatibilité avec les piles d'autres fabricants prolonge cette démarche en évitant l'obsolescence des batteries existantes.

Ce qu'on n'est pas sûrs d'avoir aimé

Des spécifications ambitieuses mais nuancées

Si Linogy met en avant une capacité impressionnante de 3600mWh (≈2400mAh à 1,5V) pour ses piles AA, les tests révèlent une réalité légèrement différente. Les mesures en conditions réelles montrent plutôt une capacité effective d'environ 3,0Wh sous charge modérée, soit approximativement 16% en-deçà des valeurs annoncées. Cet écart se creuse davantage sous forte charge (2A), où la capacité tombe à environ 2,5Wh, un phénomène certes classique pour toute batterie, mais qui relativise les promesses marketing.

La durée de vie de 1200 cycles semble plausible en conditions optimales d'utilisation, mais comme pour toute batterie lithium-ion, elle dépendra fortement des conditions réelles d'usage (profondeur de décharge, température, intensité des courants...).

Le taux d'auto-décharge annoncé montre également quelques incohérences entre les différentes communications : tantôt mentionné à 0,045% par mois (soit 88% de capacité conservée après six mois), tantôt à 12% par an. Si ces performances restent nettement supérieures aux NiMH classiques (15-20% d'auto-décharge mensuelle), l'absence de protocole standardisé pour ces mesures invite à la prudence.

Enfin, bien que la tension de 1,5V soit mise en avant comme un avantage clé, le profil de décharge montre qu'il s'agit d'une valeur nominale plutôt que strictement régulée – contrairement à certaines piles lithium-ion concurrentes intégrant un circuit électronique maintenant une tension parfaitement constante.

Une interface privilégiant l'éco-ludique au technique

L'écran e-ink du chargeur Linogy, bien que parfaitement lisible et économe en énergie, fait des choix d'affichage qui privilégient l'aspect écologique au détriment d'informations plus techniques qui auraient été précieuses. Le compteur de "batteries chargées" ne s'incrémente qu'à partir d'un certain seuil de recharge (environ un tiers de la capacité totale), ce qui peut créer une confusion lors du rechargement de piles partiellement déchargées.

L'absence d'indication précise du niveau de charge, du temps restant ou de la santé individuelle des batteries (au-delà des simples LED) pourrait frustrer les utilisateurs les plus techniques. La dimension gamifiée du suivi environnemental, bien que louable dans son intention, semble davantage orientée vers une sensibilisation grand public qu'une véritable quantification précise de l'impact écologique.

Le QR code menant au tableau de bord en ligne pose également la question de la pérennité de ce service : que deviendra cette fonctionnalité si l'entreprise cessait ses activités ou modifiait son offre ? On aurait apprécié que ces fonctionnalités connectées restent optionnelles et n'impactent pas l'utilisation principale du chargeur.

Par ailleurs, les communications marketing mentionnant "l'absence d'effet mémoire" pour vanter les piles lithium-ion semblent anachroniques, ce phénomène concernant principalement les anciennes technologies nickel-cadmium et étant déjà largement absent des NiMH modernes.

Ce que l'on a moins aimé

Un encombrement certain pour un usage fixe

Malgré ses nombreuses qualités, le chargeur Linogy impose un compromis spatial non négligeable. Le tiroir de stockage double pratiquement le volume global du dispositif, ce qui contredit certaines communications marketing évoquant un design "compact idéal pour les voyages".

La réalité nous montre plutôt un appareil destiné à trouver sa place permanente sur une étagère ou dans un tiroir de bureau. L'architecture verticale, bien que logique pour le système d'auto-éjection, crée un dispositif relativement haut qui ne s'intégrera pas discrètement partout.

De plus, la logique de fonctionnement par auto-chute des piles pleines présente un inconvénient ergonomique sur le long terme : les utilisateurs auront naturellement tendance à prélever les batteries du dessus du tiroir, créant potentiellement un déséquilibre dans la rotation optimale du stock. La capacité annoncée de 40 piles dans le tiroir semble théorique et non pratique pour un usage quotidien fluide, puisque l'accès aux batteries du fond deviendrait laborieux.

L'alimentation par USB-C est bienvenue mais un adaptateur secteur (5V; 3A recommandé) n'est pas inclus – un choix écologique compréhensible mais qui ajoute un coût supplémentaires potentiel.

Un prix qui questionne le rapport coût-bénéfice

Bien que le système Linogy ait été présenté sur Kickstarter avec un tarif « early bird » de 99 USD ( ≈ 90 € ), le coût final du chargeur reste peu clair.

$Le\; prix\; de\; vente\; macximlum\; conseillé\; est\; a\; priori\; de\; 169\; USD,\; soit\; environ\; 150\; euros,\; une\; somme\; relativement\; importante\; pour\; un\; chargeur,\; relativement$élevé pour un usage occasionnel. À ce stade, nous notons cependant qu’au moment de la rédaction, le site officiel affiche un prix de 109 USD (≈ 100 €), avec une livraison annoncée entre fin octobre et début novembre.

Ce repositionnement tarifaire améliore le rapport coût‑bénéfice, sans lever toutes les questions de long terme: durée de garantie, disponibilité des piles de remplacement, conditions de SAV et pérennité du service associé (tableau de bord éco). Les offres marketing, comme l’opération « 10 000 piles gratuites », gagneraient à être mieux cadrées dans leurs modalités.

Enfin, l’absence de benchmarks comparatifs standardisés (autonomie réelle selon appareils, comportement à basse température, performance après de nombreux cycles) complique la comparaison directe avec des références NiMH établies.

Pour un foyer très consommateur d’AA/AAA, la proposition à 109 USD devient crédible; pour un usage plus diffus, le surcoût face à des solutions NiMH reste à justifier par l’ergonomie et la vitesse de charge.

Crache ton Linogy, Myrhdin

Le chargeur tout-en-un Linogy représente une approche rafraîchissante dans un domaine où l'innovation se fait rare.

Son système intelligent d'auto-éjection et son suivi environnemental apportent une réelle valeur ajoutée pour les utilisateurs réguliers de piles AA/AAA rechargeables.

Les performances de ses batteries lithium-ion, bien qu'inférieures aux spécifications annoncées, restent impressionnantes et constituent une alternative crédible aux solutions nickel-hydrure existantes, particulièrement pour les appareils gourmands en énergie.

Cependant, son encombrement conséquent et son positionnement tarifaire élevé en feront un produit de niche plutôt qu'une révolution grand public.

Pour les foyers équipés de nombreux appareils à piles et soucieux de leur impact écologique, Linogy offre une solution élégante mais coûteuse. Pour les autres, les chargeurs et piles NiMH classiques continueront probablement de représenter un meilleur compromis économique.

Au final, Linogy réussit son pari d'innovation mais devra confirmer dans la durée la fiabilité et la pertinence de son approche.

Ce test a été réalisé par Myrhdin avec un produit fourni par le constructeur. Sa rédaction n'est le fruit d'aucune transaction financière entre le rédacteur ou JeuxOnLine et le constructeur ou les entreprises le représentant.